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Publié le 8 juillet 2011

Trisomique et alors?

17 Février 2002 – Le Matin -Saskia Galitch

Un malheureux incident met une fois encore en lumière les difficultés rencontrées au quotidien par les victimes du syndrome de Down et leur entourage.

«C’est inadmissible, et ça fait tellement mal…» Jacqueline ne décolère pas: Fabio, son fils trisomique de bientôt 31 ans, se serait vu refuser l’accès à la piscine d’un grand hôtel lausannois «en raison de sa différence», martèle-t-elle. Le directeur de l’établissement, lui, réfute catégoriquement: un tel acte de rejet n’a pu se produire dans ses murs, «jamais nous ne ferions une telle chose. Il ne s’agit que d’un triste malentendu, d’une fausse interprétation des mots et des faits…» Peut-être. N’empêche que ce quiproquo, survenu il y a une dizaine de jours, met une fois encore en lumière les difficultés rencontrées par les trisomiques et leurs proches au quotidien.

Pourtant, depuis les succès rencontrés par le film «Le huitième jour» et la série télévisée «Corky», dont les héros sont justement atteints de trisomie 21, on pensait que les mentalités avaient changé, que les esprits s’étaient un peu ouverts… «Bien sûr, globalement, de nombreux progrès ont été faits», admet Jacqueline. Mais, dans le fond, explique-t-elle, cela n’a pas vraiment bougé. Et de parler des innombrables regards lourds lancés sur elle et son fils, des propos acides entendus, des actes et gestes déplacés subis. «Des incidents désagréables, nous en avons vécu beaucoup.» Pour elle, ils sont le fait de «gens intolérants parce que ignorant tout ou presque de ce handicap».

De fait, la méconnaissance de cette anomalie chromosomique et les préjugés qui vont avec ont la peau dure, et la tendance générale porterait plus à l’apitoiement tout aussi blessant que le rejet qu’à l’acceptation simple.

En passant par-delà ces (mauvaises) idées reçues, on constate qu’une personne atteinte de trisomie peut en effet être relativement indépendante et s’intégrer aussi bien dans la société que dans un milieu professionnel. Ainsi, de nombreux exemples de parfaite insertion dans le monde du travail et pas uniquement en atelier protégé prouvent que, avec un cahier des charges adapté, un peu de confiance et de compréhension de la part de leur employeur, les trisomiques peuvent tout à fait assumer les tâches qui leur sont confiées. Ce que confirme d’ailleurs Jacqueline: «Depuis qu’il est tout petit, Fabio a été stimulé. Aujourd’hui, il est autonome et se débrouille très bien: il prend le bus seul pour aller travailler, lit les journaux, s’informe tous les jours, a des centres d’intérêts multiples, écrit, va à la poste effectuer mes paiements, aide à la maison, même si je ne suis pas là. A vrai dire, son handicap, ce n’est pas lui qui m’y fait penser. Ce sont les autres qui me le remettent en tête…»

Ce qu’elle voudrait? Qu’on cesse d’assimiler les personnes touchées par ce syndrome à des malades. Qu’on les respecte. Qu’on les accepte comme ils sont, simplement.

Qu’est-ce que la trisomie 21?

La trisomie 21, aussi appelée «syndrome de Down», est une anomalie qui touche le patrimoine génétique. La personne qui en est atteinte a 47 chromosomes au lieu de quarante-six car, sur la paire «21», on constate la présence d’un chromosome surnuméraire. Cette modification, dont on ne connaît pas la cause, a un impact sur les traits ainsi que sur le développement, aussi bien physique que mental, qui s’en trouve ralenti. Cela dit, si quelques caractéristiques sont communes aux trisomiques, il existe de grandes différences entre eux, liées aussi bien aux facteurs héréditaires qu’aux notions acquises dès le plus jeune âge.

Sur le plan physique, on note quelques constantes plus ou moins marquées. Par ailleurs, une série d’anomalies physiologiques peuvent être associées au syndrome de Down: problèmes cardiaques, orthopédiques, endocriniens, immunitaires, auditifs ou ophtalmiques. Un suivi médical précoce et attentif permet d’éviter bien des complications.

Sur le plan mental, intellectuel et émotionnel, on peut dire que:

Le QI moyen d’un trisomique est d’environ 50 (la «norme» se situe entre 85 et 120). Il faut relever que ce «petit résultat» n’implique pas les fonctions supérieures morales ou esthétiques, qui, elles, restent absolument normales. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les capacités intellectuelles d’un individu ne sont pas fixées une fois pour toutes: elles dépendent beaucoup des conditions et stimulations dans lesquelles l’individu se développe. C’est dire l’importance de l’entourage et des parents dans le cas de la trisomie.

Beaucoup de trisomiques savent lire, écrire et se faire comprendre même si, à cause de difficultés articulatoires dues à leur morphologie, ils ne s’expriment pas toujours parfaitement oralement

Comme pour n’importe quel enfant, l’adolescence est une période de vie très délicate. C’est notamment à ce moment-là que le trisomique prend réellement conscience de sa différence. Pour qu’il puisse la vivre au mieux durant cette période-là puis dans sa vie d’adulte, l’attention et l’affection inconditionnelle de son entourage sont indispensables.

La plupart des trisomiques sont très tendres, démonstratifs, et s’attachent à ceux qui les entourent avec amour et respect. Ils sont, par ailleurs, très fréquemment facétieux, gais, heureux de vivre. De nombreux témoignages les décrivent comme des «rayons de soleil». Très sensibles, ils ressentent fortement le rejet et en souffrent terriblement.

En savoir plus…

Pour aider les familles de trisomiques et permettre aux gens de s’informer, une association romande s’est créée il y a deux ans, sous l’impulsion de parents désireux de partager leurs expériences et d’échanger des informations (médicales ou pratiques). Baptisée «ART 21» (Association romande trisomie 21), elle lutte autant que faire se peut contre les préjugés et «souhaite démystifier ce handicap trop méconnu et par conséquent mal accepté et mal vécu dans notre pays»…

 


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