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Publié le 13 septembre 2011

Etre ou ne pas naître…

Mai 2010 – Journal ART 21 des 10 ans – Laurent Jenny (président 2005-2010)

telle est l’affirmation qui vous concerne, vous qui êtes venus au monde sans que quiconque ne se soucie de votre avis. Belle entrée en matière dans une société qui voue un véritable culte à la liberté individuelle !

…telle est la question, quand il s’agit de transmettre cette vie à une éventuelle descendance. Et quelle vie ?  Liberté retrouvée ! Si je veux, quand je veux ! Qui je veux ? Fille ou garçon, yeux bleus ou yeux bruns ? Liberté es-tu là ? Ah ! Te revoilà : « Et si c’est avec une trisomie 21 : oui ou non ? » Te revoilà, liberté, aguichée d’une lourde responsabilité, affublée d’un pénible choix. Comment t’arracher cet accoutrement ? D’un coup de deuil sans doute. D’un coup d’anticipation, peut-être, teintée de connaissances !

Choisir en toute connaissance de cause, certes ! Mais pas facile, quand un diagnostic vous procure une sensation d’écroulement psychologique. Et qu’est-ce qui s’effondre, au moment où vous perdez pied dans votre vie à l’annonce de la trisomie de votre (futur) enfant ? C’est peut-être bien ce mur d’ignorance qui vous sépare d’une partie de sa réalité. Un monde que vous allez découvrir, comme un pays inconnu, auquel vous revendiquerez finalement votre appartenance. Vous le ferez fièrement visiter, profitant de cette brèche entaillée dans ce que vous verrez comme un mur de la honte érigé pour former deux mondes, celui des valides et celui des non-valides. Peut-être… Les témoignages retenus dans cette brochure donnent un éclairage croisé sur la venue au monde d’un enfant porteur de trisomie 21.

L’Association Romande Trisomie 21 ne prend pas position sur l’usage du diagnostic prénatal, tant la lecture du handicap est différente d’une personne à l’autre. En prendre acte certes, mais prôner cette liberté reviendrait dès lors à cautionner l’éventuelle élimination de celles et ceux dont elle défend la cause. Elle s’inquiète cependant de l’automatisme qui régit généralement le passage d’un diagnostic prénatal de trisomie 21 à l’interruption de grossesse, sachant que l’espérance de vie de ces personnes est passée de 9 à près de 60 ans, avec des perspectives non négligeables d’intégration sociale et professionnelle satisfaisante. Elle se réjouit par contre de l’intérêt croissant de la médecine qui cherche à réduire l’impact négatif du syndrome sur la santé et la qualité de vie. Soulager, plutôt qu’éliminer, cet enjeu scientifique revêt une dimension éthique considérable. A la suite des immenses progrès déjà réalisés, la génétique nous place à l’aube d’une ère nouvelle, porteuse d’espoirs réalistes.

Mais que faire de ces avancées médicales, sans une véritable volonté d’intégration, ancrée dans la société, sans préjugés, sans limites imposées ajoutées aux entraves de ce chromosome surnuméraire. Le temps est venu de confronter les valeurs communes à celles du handicap. Oui, il y a quelque chose en plus chez les personnes atteintes de trisomie 21 et pas seulement un chromosome. Développer le partenariat avec la personne d’abord, les différents intervenants, les parents et les proches, puis relever les défis qu’il impose, c’est une façon d’exploiter avantageusement ce plus. Des chercheurs s’y attellent et nous invitent à leur table, offrant un retentissement prometteur à nos témoignages et à notre expérience auprès de celles et ceux qui partagent avec nous la prise en charge de nos filles et de nos fils petits ou grands.

Ces derniers nous montrent quotidiennement leurs capacités, passant outre leurs difficultés avec une ténacité que certains diront toute trisomique (c’est ici un plus) et sans doute des appréhensions. Mais ils s’élancent à la conquête de la vie, mus, comme tout un chacun, par des désirs, des ambitions et une soif de bonheur à partager. Nous devons les encourager et les y aider.

Dès lors, la mission d’ART 21 s’inscrit comme un plaidoyer pour un naître humain.

 


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